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Lait
Volume 14, Number 139, 1934
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Page(s) | 924 - 934 | |
DOI | https://doi.org/10.1051/lait:193413941 |
DOI: 10.1051/lait:193413941
Pasteurisation rationnelle du lait
C. GORINIDocteur en Médecine, Directeur au Laboratoire de Bactériologie à l'Ecole supérieure d'Agriculture de Milan
Résumé - D'une série de recherches exécutées sur différents procédés et différents appareils de pasteurisation et sur des pasteurisations de laboratoire j'ai recueilli d'autres éléments à l'appui de ma thèse, que, tant au point de vue sanitaire qu'au point de vue commercial, il importe de prendre en considération moins le nombre total que la qualité des germes survivants dans le lait pasteurisé. En reliant mes résultats actuels avec les précédents, j'en arrive aux conclusions suivantes qui embrassent le côté alimentaire et le côté industriel de la question.
La pasteurisation du lait doit répondre aux exigences suivantes : garantir en même temps la salubrité parfaite et une conservabilité satisfaisante du lait, en sauvegardant le plus possible ses propriétés organoleptiques, nutritives et fromagères. Pour concilier tous ces postulats une bonne pasteurisation doit se proposer une tâche microbicide plutôt qualitative que quantitative sur la direction de trois principes :
1. Qu'elle ne peut pas arriver à une stérilisation complète du lait à cause de la microflore thermorésistante et surtout à cause des bacilles sporogènes, dont l'anéantissement exige des traitements thermiques trop dangereux pour les qualités biochimiques du lait;
2. Que, d'autre part, elle ne doit pas laisser survivre seulement les germes sporogènes, parce que ceux-ci provoquent des altérations précoces et nuisibles du lait :
3. Que, heureusement, après les sporogènes, les germes les plus thermorésistants sont constitués par les immanquables lactocoques, type Mammacoccus, lesquels sont non seulement par eux-mêmes innocents, mais bien plus, bienfaisants au double point de vue alimentaire et fromager, et entravent le développement des bacilles sporogènes.
Par conséquent, une bonne pasteurisation doit être suffisante pour détruire tous les germes pathogènes et la plus grande partie des germes saprophytes, en ménageant pourtant les lactocoques les plus thermorésistants. Cette pasteurisation donc peut s'appeler la pasteurisation rationnelle du lait, soit pour les usages alimentaires, soit pour les usages fromagers Elle peut être réalisée par différents procédés et appareils et toujours d'autant plus facilement que le lait a été produit et récolté plus hygiéniquement, c'est-à-dire que le lait est plus pauvre en germes sporogènes avant la pasteurisation ; cela prouve combien l'effet de la pasteurisation dépend moins de la charge microbienne totale du lait cru que de la qualité des germes y contenus.
Une superpasteurisation, qui serait poussée jusqu'à la destruction ou à la paralysie absolue des lactocoques les plus thermorésistants, en laissant champ libre aux bacilles sporogènes, peut donner des résultats plus satisfaisants au contrôle bactériologique quantitatif, mais peut se révéler plus nuisible à la conservation du lait et à son utilisation fromagère.
Les perfectionnements dans la technique de pasteurisation du lait doivent viser moins à une destruction quantitative plus profonde et plus large de germes qu'à une destruction plus rapide des germes, de sorte que le lait subisse moindres modifications, moindres détériorements biochimiques, tout en se délivrant de tous les germes pathogènes et des germes saprophytes jusqu'à la limite des lactocoques les plus thermorésistants, type Mammacoccus, en prenant garde que la résistance de ces lactocoques, quoiqu'elle puisse arriver jusqu'à 80° C., va s'amoindrissant notablement au delà de 70°C.
De mes contrôles, il résulte que la capacité de conservation d'un lait soumis à la dite pasteurisation rationnelle, prélevé en des récipients stériles à sa sortie du pasteurisateur, est telle qu'il peut se maintenir inaltéré pendant au moins 48 heures (parfois même 72 heures) à là température de 20-25° C. Le contrôle de la durée de conservation du lait pasteurisé devrait donc s'accoupler au contrôle de sa charge microbienne pour juger la réussite de la pasteurisation et pour comparer les procédés et les appareils de pasteurisation