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Issue
Lait
Volume 9, Number 90, 1929
Page(s) 1032 - 1046
DOI https://doi.org/10.1051/lait:19299051
Lait 9 (1929) 1032-1046
DOI: 10.1051/lait:19299051

Recherches sur la pasteurisation basse du lait. Une nouvelle réaction pour contrôler la température du chauffage. (Suite et fin)

ORLA-JENSEN, C. LE DOUS, J. JACOBSEN and N. COTTE

Résumé - 1- Le travail actuel est un complément de recherches antérieures relatives aux modifications physiques, chimiques et bactériologiques qui ont lieu dans le lait soumis à un chauffage court ou prolongé à des températures diverses. On a spécialement étudié la possibilité d'employer des méthodes de pasteurisation basse plus rapides (telle que 5 minutes de chauffage à 68° C.) au lieu de la pasteurisation lente généralement employée (30 minutes de chauffage à 63°C.) ; mais avant que ces procédés n'aient été utilisés pratiquement, nous n'osons pas recommander de méthode nouvelle.

2- Nous avons réussi à montrer que l'albumine du lait qui se coagule entièrement à des températures entre 80° et 90° C, se solubilise à nouveau à des températures plus élevées sous forme d'albuminate. Sous cette forme, l'albumine se trouve aussi dans le lait cuit. La coagulation de l'albumine ainsi que sa nouvelle dissolution, ont heu dans le sérum à des températures un peu inférieures à celles auxquelles elles ont lieu dans le lait.

3- Nous avons établi une méthode plus précise pour la détermination de la proportion d'amylase du lait.

4- La partie la plus importance de notre étude a été la recherche d'une réaction montrant si le lait a été soumis à la pasteurisation lente, et nous avons réussi à trouver une telle réaction, basée sur la diminution de la montée de la crème que le lait subit par la chaleur ; en outre, nous avons étudié particulièrement tous les facteurs qui agissent sur la montée de la crème du lait.

5- La réaction crémométrique trouvée repose sur ce que la montée de la crème est facilitée dans le lait cru, mais retardée dans le lait ayant été soumis à la pasteurisation lente par addition d'eau. Le rapport entre la couche de crème dans le lait étendu et le lait non étendu (calculé sur la même quantité de lait) est par conséquent plus grand que 1 dans le lait cru, mais inférieur à 1 dans le lait ayant été soumis à la pasteurisation lente. Par une dilution convenable avec de l'eau, on peut obtenir que le changement de rapport corresponde exactement au mode de chauffage employé pour la pasteurisation lente.

6- La réaction s'exécute de la manière suivante : " Le lait qui doit être étudié est d'abord chauffé à 50° C. pendant 5 minutes, puis on en aspire avec une pipette respectivement 5 et 10 cmc, qu'on transvide dans deux crémo-butyromètres de HOYBERG. Les 5 cmc. de lait sont mélangés avec soin avec autant d'eau, et les deux échantillons de lait sont placés pendant deux heures dans de l'eau courante à 12°-15° C. : on note ensuite les épaisseurs des couches de crème. "

7- Le traitement préliminaire sus-indiqué du lait (5 minutes de chauffage à 50° C.) est nécessaire pour faire disparaître la paresse de la montée de la crème dûe au froid. Les causes de cette paresse de la montée de la crème dûe au froid et de celle dûe à l'individualité de la vache sont discutées en détail.

8- Il est montré que le facteur principal de la montée spontanée de la crème du lait est une agglutinine, qui fait se réunir en masses compactes les globules de matière grasse, ce qui fait qu'ils montent beaucoup plus rapidement qu'ils ne le font quand ils sont isolés. Cette agglutinine commence déjà à être détruite après 1 / 2 heure de chauffage à 63° C, et est presque entièrement détruite par 5 minutes de chauffage à 68° C.

9- L'agglutinine passe dans le sérum du lait et se précipite avec la fraction de globuline. Pour agir sur les globules gras, il faut toutefois encore un facteur qui passe aussi dans le sérum, mais qui ne se précipite pas avec la fraction de globuline ou d'albumine. Ce facteur est plus résistant à la chaleur que l'agglutinine, car il n'est détruit qu'à des températures supérieures à 90° C. Donc, puisque l'agglutination exige un-complément, ce phénomène est peut-être à considérer comme une conglutination.

10- Le colostrum contient 5 à 10 fois autant d'agglutinine que le lait de vache ordinaire.

11- Les sels du lait agissent pour retarder fortement l'agglutination des globules gras, et si la montée de la crème a lieu plus facilement dans le lait cru, quand on l'étend, la toute première cause de ce phénomène est qu'on diminue ainsi sa concentration saline.

12- La viscosité du lait est par contre d'importance secondaire pour la montée de la crème, d'où il s'ensuit que le sérum ne laisse pas monter sa crème plus facilement que le lait et que, dans le mélange crème-eau, la crème ne se sépare pas du tout si on n'ajoute pas d'agglutinine, ainsi que son complément.

13- Si dans le lait ayant subi la pasteurisation basse, l'addition d'eau agit pour retarder la montée de la crème, C'est parce que l'agglutinine est déjà, dans un tel lait, tellement détruite, qu'une nouvelle diminution de sa quantité n'est pas supportable.

14- Dans le lait et dans le sérum qui contiennent de l'albumine coagulée, la présence de ce produit agit au plus haut degré pour faciliter la séparation de la crème. En ce qui concerne le lait, ceci n'est, du reste, exact que quand il est additionné d'eau.

15- Un chauffage de 5 minutes à 68° C. détruit à peu près autant de bactéries qu'une demi-heure de chauffage à 63° C. Les bactéries de la tuberculose sont rendus inoffensives par les 2 méthodes de pasteurisation.

16- Le nombre de bactéries qui survivent à la pasteurisation basse du lait dépend surtout de l'espèce à laquelle elles appartiennent, et est presque indépendant de la teneur en bactéries originale du lait. Le pour mille des survivants qui, pour la pasteurisation lente, varie entre 0,1 et 30 est, par conséquent, une mauvaise représentation de l'effectivité de la pasteurisation.

17- La pasteurisation basse détruit pratiquement toutes les bactéries (à l'exception de certains microcoques) qui peuvent se développer à basse température, et le lait ayant été soumis à la pasteurisation basse se conserve par conséquent presque aussi bien que le lait ayant été soumis à la pasteurisation haute, si seulement on le maintient à basse température (5° C. ou en-dessous).

18- Les pouvoirs bactéricides du lait sont bien plus aptes à résister qu'on ne le croit généralement. Ils ne sont ébranlés que par la pasteurisation haute et sont spécialement actifs dans le lait ayant subi la pasteurisation basse, de sorte que celui-ci conservé à 5° C. peut arriver à contenir beaucoup moins de bactéries que tout de suite après la pasteurisation. Comme dans les villes, il se passe toujours quelque temps avant que le lait pasteurisé ne soit vendu, cette circonstance n'est pas sans importance pratique.

19- Les pouvoirs bactéricides du lait semblent se composer de plusieurs composants différents, et nous nous réservons de revenir sur cette question dans une étude spéciale.

(Traduction O. Wolf.)